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Aventuriers russes du temps de Pierre le Grand

Histoires de marins, de chevaliers et de gentilshommes (1700-1730)
Année de parution : 2016
ISBN : 978-2-7204-0543-3
168 pages
18,95 €
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Ouvrage publié avec le soutien de
l’Institution de traduction (ANO, Institut Perevoda), Russie

Glossaire des néologismes, bibliographie

Pierre le Grand s’est intéressé à tout, sauf à la littérature. S’il se représente en démiurge, pétrissant et fondant la statue de la Russie nouvelle, et s’il convoque peintres, graveurs, poètes et historiens pour glorifier son règne, il ne revendique aucune ambition et ne manifeste aucun goût en matière de belles-lettres. Les spécialistes de ce domaine lui ont rendu son mépris en affirmant que son règne est le point le plus bas de la création littéraire dans son pays. La tradition de la littérature russe ancienne touche à sa fin, même si l’on continue de copier ça et là des chroniques, des récits édifiants ou satiriques, des vers syllabiques, des itinéraires de pèlerins et des Vies de saints. La littérature occidentalisée, acclimatant en Russie le roman, le drame et la comédie, la poésie classique, ou la presse d’information est encore en gestation. Et pourtant, il existe une poignée de « récits pétroviens » (petrovskie povesti) des années 1700-1730 qui lancent un pont entre les deux mondes. Ils s’extraient du cocon des oeuvres narratives traditionnelles, presque toujours situées à l’intérieur de l’espace russe, ou dans l’univers slave orthodoxe qui s’étend jusqu’à « Tsargrad » (Constantinopole), la « Montage Sainte » (le mon Athos), ou Jérusalem.

Ce livre est la première traduction française des trois principaux récits pétroviens : L’Histoire du marin russe Basile Kariotski, L’Histoire du chevalier russe Alexandre et L’Histoire du Fils de gentilhomme. Ils ont en commun de mettre en scène un héros nouveau, russe » au sens moderne du terme (rossijskij), marin de préférence, et entreprenant. S’il conserve précieusement sa foi orthodoxe et sa piété filiale, il part hardiment à l’étranger et se dirige, comme Pierre le Grand lui-même, vers la Hollande, l’Angleterre ou la France. Il entend y conquérir gloire et fortune, mais aussi et surtout science (nauka). Le monde qu’il sillonne est plein de périls et d’aventures, de femmes et d’amour (en français dans le texte). S’y mélangent joyeusement les réalités du XVIIIe siècle et des réminiscences des romans de chevalerie ou des histoires galantes que les gentilshommes de France ou d’Angletterre connaissent bien. D’un épisode à l’autre, comme sur les tapisseries des Gobelins, notre marin russe est transporté de la rade de Londres où il manoeuvre avec la flotte de guerre, à un tournoi en armures ou à une embuscade de brigands dans une forêt impénétrable. Il passe du Décaméron à l’Amadis de Gaule, tout en suivant le Règlement de la marine édicté par Pierre. Deux héros russes sur trois meurent tragiquement à la fin de leurs tribulations, seul le marin Basile rentre heureux comme Ulysse, après avoir fait son long voyage. L’essentiel n’est pas le dénouement, mais le départ. Ces récits sont à l’image d’une aube nouvelle : l’air est frais, le vent se lève, les couleurs sont vives, l’aventure nous appelle.

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