Le Prolongement du point
Prolonger le point, c’est cesser d’avoir Moscou pour seul centre et se tourner aussi bien vers l’Europe que vers les steppes et leur immensité, c’est le refus du repli, la pensée en mouvement. C’est refaire, parfois les pieds dans la boue, les voyages de Karamzine ou de Tolstoï, pleurer Lenz, tenter d’oublier Pouchkine et comprendre enfin qui il est. C’est traverser sans timidité des oeuvres inconnues et rêver de s’y plonger. Puis embarquer sur l’Espérance pour la première expédition maritime russe autour du monde, y croiser un orang-outang et le désastreux neveu de Tolstoï. C’est bercer le tsar russe. Tracer des lignes de symétrie ou de fuite, suivre les méandres de l’errance, jongler avec des instruments d’optique, changer de focale ou de prisme. C’est être pris dans un joyeux tourbillon d’érudition, arpenter sans relâche l’espace créé par le mot, dynamiter le temps, bousculer les catégories, sauter par-dessus les frontières, penser, penser encore. C’est l’exercice de la liberté.